Cueillettes urbaines

Fin août, les étals à La Chaux-de-Fonds débordaient de fruits à noyau. En ville, j’aperçois un arbre chargé de prunes que personne ne ramasse. Une confiture était née.

C’est curieux, la nature en ville. On la croise souvent sans la voir.
Alors qu’on a la chance à 1000 mètres d’avoir aux alentours immédiats des surfaces bâties, de belles ressources vivantes. Elles sont indispensables pour:

  • Leurs bienfaits: ombrage, espaces de ressourcement et de jeux pour les enfants, pause pour le regard encombré de lignes droites.
  • La biodiversité: essentiellement composée d’arbres, la présence du vivant, ce sont aussi les abeilles des ruchers sur les toits, les étangs hébergeant libellules, moustiques et amphibiens, les nichoirs à oiseaux un peu partout (les martinets remercient le barbu Marcel Jacquat).

    En train de baguer des martinets noirs (©ArcInfo Lucas Vuitel)
  • Les récoltes des jardins familiaux, des potagers – pour celles et ceux qui ont la chance d’en avoir un devant leur maison –et les cueillettes potentielles: les raisinets jamais ramassés, les champignons au fond des parcs, les bourgeons de sapin à macérer pour calmer la toux l’hiver.

Disparition

À propos de plantations urbaines, où ont fini les jardinets des Incroyables Comestibles qui fleurirent un temps dans des bacs en bois? Offrant herbettes et salades, ils étaient à la disposition du public. L’idée Les initiant·es comptaient sur les bons soins de la population.
Il semble qu’il n’y a que peu de doigts verts solidaires en ville. Apparemment, les bénévoles se sont lassés de ramasser les déchets peu ragoûtants que les malotrus s’évertuaient à jeter sur les plantes. Et la sécheresse a fait le reste…

Foin de regrets, il reste encore de belles surprises, des pissenlits à foison pour concocter une espèce de miel par exemple ou de la chélidoine pour faire partir les verrues.

Champignons à l’arrêt de bus

Un jour en sortant prendre le bus, j’ai cru halluciner: il y avait une cinquantaine de pieds bleus tout frais, sortis de terre sous un petit hêtre rouge entouré de murs en béton. Sans hésiter, je suis retourné à la maison chercher un panier en osier et un couteau.
Une dame qui passait s’est étonné: «Vous êtes timbré, y’a tous les chiens du quartier qui pissent dessus». Je n’ai pas répondu à la passante. Pas eu le réflexe de lui rétorquer qu’en forêt d’autres animaux pissent aussi. Les champignons poussent très vite, la probabilité que ces tricholomes nus présents sur les feuilles en décomposition aient reçu la visite d’un clébard matinal était faible. Au pire, un peu d’urine canine est moins grave que des pesticides.

Pieds bleus goûteux

Dans le cas présent, il y avait des bouts d’écorce pour empêcher les mauvaises herbes de s’installer, cela avait favorisé la pousse. Quant au possible passage d’un renard incontinent, l’endroit était trop exposé pour que Goupil s’y soit soulagé.

Grapiller

Revenons aux prunes trouvées à côté d’un chemin menant à un atelier. Il y avait là trois beaux fruitiers qu’il a suffi de secouer un coup. Qu’on ne vienne pas me dire que j’ai volé, il en restait des kilos, j’ai glané en quelque sorte.
Un matin d’arrière-automne, j’ai goûté au résultat de cette récolte gratuite: surprenante attaque d’acidité fraîche et lucide, consistance moelleuse sans trop de sucre, longue finale de fruit à noyau 😉 et de pomme reinette, belle teinte rouge ambrée, apparence translucide. Un grand cru.

Rien que d’y songer, je retourne de ce pas me faire une tartine de ces succulentes prunes urbaines.

Récolte abondante cette année