Bus: passagers accrochez-vous

Grâce aux nouveaux machinistes engagé·es, TransN tient bien l’horaire. Six expériences subjectives en bus à La Chaux-de-Fonds.

Deux vieilles dames discutent dans un bus 304 descendant de l’hôpital direction gare:
– Vous avez vu comment ils conduisent?
– Oui, ils freinent un peu brusque des fois.
– Moi hier, j’ai vu un jeune black tomber, il ne se tenait que d’un main.
– Bon, c’est vrai qu’il faut s’accrocher quand ils démarrent.

Vous me direz que les personnes âgées sont impressionnables et se plaignent aisément. Afin de dépasser la rouspétance proverbiale des chauxoises et chauxois (seuls les Genevois font mieux), en voiture pour quelques trajets d’observation subjectives et unilatérales.

Un arrêt qui sera bientôt repeint

Expérience passager

Voyageant depuis 50 ans en bus sur le réseau des TC devenus TRN puis transmutés en TransN en 2012, mon point de vue sera partiel, voire partial.
Commençons par un bon acquis de la pandémie: désormais toutes les portes du bus s’ouvrent aux arrêts. Enfin, en principe. En tout cas, cela aide à monter et descendre plus rapidement.

Les transports publics sont pratiques, chauffeuses et chauffeurs généralement aimables. Mais voilà, on se souvient plus facilement des rares pénibles… qui sont peut-être juste fatigué·es ou stressé·es.
Passons au registre de la cadence (toutes les 10 minutes sur les lignes principales, 15, 20 ou 30 minutes sur les petites lignes) et à la manière de découvrir à quelle heure le bus va passer. Les grands arrêts le long du Pod et à la gare disposent de panneaux fort utiles d’informations lumineux en temps réel.

Il existe trois types d’horaires: ceux de jour, ceux de nuit et ceux du dimanche. L’horaire affiché cite un horaire de vacances, mais il est difficile à discerner, vu qu’il ne concerne que deux lignes et 6 courses si j’ai bien lu.


Autre bémol: il est laborieux d’expliquer au touriste de passage le changement de numérotation et de parcours de la ligne 304 le soir. Bon, il paraît que cela économise du personnel et évite des bus peu ou pas remplis, donc cela risque de perdurer.

Horaire du dimanche

Notons que la passagère de petite taille ou le gars en chaise roulante aura de la peine à consulter les horaires affichés aux arrêts. Ils sont placés fort haut.

Si vous n’aimez pas déchiffrer les indicateurs, TransN propose trois formules: une app, des horaires sur le site ou des feuilles imprimées sur demande avec l’horaire de l’arrêt proche de votre domicile.

Expérience chauffeur

Discutant avec différents chauffeurs, je constate qu’il y a quelques point noirs sur le réseau urbain, tel le carrefour rue de la Cure/rue de la Balance où les automobilistes ignorent parfois les feux. Sur la même ligne 301, même topo à la jonction entre la rue Fritz-Courvoisier/rue de l’Etoile, endroit très fréquenté où le feu rouge a été hors service pendant de long mois.
À cet endroit, les chauffeurs finissent par ralentir préventivement comme lorsqu’ils croisent la rue Numa-Droz.
À la montée vers le Bois du Petit Château, les Stop plus dissuasifs vers la bibliothèque ont été remplacés par des Cédez le passage. Un conducteur chevronné estime que les accrochages ont été multipliés après ce changement de signalisation.
Idem à la descente rue du Modulor, au croisement de cette transversale, régulièrement des voitures passent sans s’arrêter au mépris du Stop pourtant bien visible.

Le carrefour du Casino mérite d’être mentionné; là les feux ont été supprimés et le trafic est plus fluide. Tout le monde ou presque se réjouit de cette nouveauté.

Sans feu, moins d’attente

La question de la priorité aux feux encore existants n’est pas très claire: sur les voies réservées du Pod, le bus peut partir un brin plus tôt que le reste du trafic. Mais à la sortie de la gare, tintin, pas de priorité. Mystère de la programmation.

La vie des conducteurs et conductrices de bus est truffée d’inattendus. Les dangers sont multiples: distrait·es scotchés à leur téléphone qui ne regardent pas et traversent la route, vélos ou scooters n’indiquant pas leur changement de direction, on en passe et des plus surprenantes.

Expérience chauffeurs 2

La flexibilité du temps de travail est un obstacle à l’embauche: il faut travailler selon des tournées pas forcément compatibles avec une routine de repas familiaux à heures fixes, sans parler des weekends.

Espacité bien desservi

Que celles et ceux qui trouvent que ça devrait être mieux, plus ceci, plus cela, aillent s’enquérir lors d’une pause en tête de parcours du pourquoi d’un retard ou d’une suppression de bus: souvent le chauffeur n’y est pour rien, car les conditions de travail sont loin d’être idéales: difficile d’avoir vite un véhicule de rechange, personnel peu nombreux en cas de maladies (une «traîne de grippe» par ex.)

Avec 516 collaboratrices et collaborateurs, 281 km desservis, TransN est un moyen poisson à l’échelle des TP des villes suisses. Outre 33 trains, l’entreprise dispose d’une flotte de véhicules diversifiée d’une centaine d’autobus grand et petits. Notez que les bus thermiques ou hybrides sont différents suivant les parcours auxquels ils sont attribués. Les 32 trolleybus ne circulent que sur le littoral en attendant le retour des bus tout électriques à La Tchaux.

Expériences tarifaires

Heureusement, il est possible encore d’acheter des billets dans le véhicule, car les automates à billet ne sont pas installés partout. Certes, la consigne veut qu’on ne puisse pas acquérir un billet (pardon: un titre de transport) dans le véhicule s’il y a un distributeur. Or des chauffeurs et chauffeuses bienveillant·es demeurent souples si nécessaire ou si l’automate est en panne. Reste la meilleure solution: un abonnement ou Fairtiq si vous n’êtes pas trop tête en l’air (il faut cliquer en sortant à un arrêt).
Une particularité à signaler: l’abonnement général suisse pour chiens à 350.- francs par an. Si le toutou supporte les autres passagers.

Expérience de nuit

À partir de 20 heures préparez-vous au joies de l’attente. Entendez qu’une cadence à la demi-heure a été introduite (sans doute par mesure d’économie) et que les correspondances à la gare vous laissent de temps d’en griller une ou de vérifier tous vos messages.

En grisé, parcours du soir

Les employé·es apprécient, car c’est moins stress. Revers de la médaille, comme il faut ¾ d’heure pour passer de la patinoire à l’hôpital, moins de gens envisagent de prendre le bus.
Alors qu’à la cadence de 20 minutes, c’est plus tentant de devenir usager des TP.

Enfin pour les fêtardes et fêtards, le Noctambus est LE moyen de boire sans risquer son permis de conduire.

Réseau nocturne

Expériences ailleurs

Un gros point d’interrogation subsiste: pourquoi le principe d’un réseau en étoile – à savoir toutes les lignes convergent à un moment donné au même endroit – n’a pas évolué depuis 50 ans? Comme beaucoup de villes, les TP de La Chaux-de-Fonds ont allongé des lignes en fonction de l’extension du domaine construit pour améliorer l’accès aux zones de logements ou de travail.
D’autres communes ont rajouté une ligne circulaire bidirectionnelle ne passant pas au centre-ville, déjà fort encombré.
On pourrait ainsi se rendre des Foulets à l’hôpital sans passer par la gare, via les Forges ou des Arêtes au Bois du Petit Château plus directement.

Las, il semble que nos édiles, à l’exception de Théo Huguenin-Elie parfois aperçu dans un véhicule, ne sont guère adeptes du bus.
Maintenant qu’un réseau de pistes cyclables commence à se mettre en place, les écolos pourraient penser à l’étape suivante. En tout cas un vaste potentiel d’amélioration est là.

Expériences à venir

Pour desservir le réseau avec les mêmes cadences en polluant moins, TransN a prévu de réintroduire des trolleybus sur les lignes 301 (Arêtes – Recorne) et 304 (Hôpital – Eplatures-nord). La ligne aérienne a même été refaite à neuf il y a peu entre la rue de Chasseral et le Pod.

Double caténaire au bas d’une rue à voie unique

Seul hic: la rénovation a suivi l’ancien tracé (rue Docteur Coullery dans les deux sens) alors que le bus passent actuellement par la rue du Modulor. Le problème serait résolu en mettant en service des bus qui «déperchent» automatiquement.
En effet, les enrouleurs qui tendent les perches peuvent aujourd’hui être actionnés sans sortir du véhicule lorsqu’il n’y a pas de caténaire ou que la ligne aérienne est interrompue par un chantier. Quelques centaines de mètres plus loin, manœuvre inverse: on «reperche» en relevant depuis la cabine de conduite les sources d’alimentation en visant deux espèces d’entonnoir disposés à l’endroit où reprend le trolley. L’endroit est signalé au sol par marquages. «Il faudra voir en hiver si ces marques seront toujours visibles», signale un chauffeur.

Ce système devrait, semble-t-il, être adopté Place la Gare, car il n’est pas possible en l’état de réinstaller des lignes de contact. En effet, les piliers du nouveau toit plat sont trop minces. Autrement dit, ils ne sont pas assez solides pour tenir la tension mécanique nécessaire à maintenir les caténaires. Donc sans reconstruire le soutènement du toit, on déperchera et reperchera.

En attendant, les bus hybrides feront toujours grincer des dents ceux qui sont allergiques au bruit et aux gaz d’échappement.

Terminons sur deux notes optimistes:

  • Contraint d’économiser l’énergie, les TP du canton seront moins (sur)chauffés à partir de ce mois. Bravo, on pourra laisser le pull enfilé à la maison.
  • TransN a fait un recyclage remarquable avec les pierres du vieux pont de la Malakoff.
Le 301 au carrefour du Casino