Futur parking couvert de bois aux Forains

Pour compenser 80 places de parc supprimées autour de la Place du Marché, la Ville a négocié avec le TCS un havre pour 455 voitures de trois étages avec accès piétonnier.

Que les nostalgiques du cirque Knie se rassurent: la dynastie de Rapperswil a décidé de remanier sa tournée et de renoncer à planter sa tente chez nous avant que les autorités ne décident de bâtir sur cette grande place vide.

En fait, les gabarits érigés récemment sur la place des Forains (dite du Gaz dans la mémoire des retraités) sont le fruit d’un compromis négocié en toute hâte au début de l’an dernier entre le TCS et le Conseil communal.
Rappel: fin 2020 le grand club automobile (40’000 Neuchâtelois·es y adhèrent) avait lancé un référendum contre le nouvel aménagement de la place du Marché. Un autre groupe de citoyenn·nes, emmené·es par le Centre et l’UDC, avait aussi commencé à récolter des signatures. Patatras, deux semaines avant la date butoir pour déposer le référendum, le TCS retire son opposition à certaines conditions compensatoires: mettre à disposition suffisamment de places de parc, assorties d’un aménagement de la rue de la Ronde.

Négociation scellée par une convention

Comment a-t-on résolu le problème? Le Service technique de la commune avait ce projet de parking dans ses tiroirs, sans calendrier précis fixé pour sa réalisation.
Selon les renseignements fournis par David Erard, président du TCS neuchâtelois, le club automobile a obtenu que cette construction voie le jour dans les meilleurs délais et surtout, souligne le président «avant la piétonnisation de la Place du Marché».
Ainsi en négociant habilement avec les conseillers communaux Théo Huguenin-Elie et Jean-Daniel Jeanneret, le TCS a décroché des promesses fermes, concrétisées dans une convention écrite, concernant tant le parking qu’une liaison par la rue de la Ronde. Cette rue sera piétonne sur un tronçon allant de la rue de la Balance (à la hauteur de la Casa Rossa) à la rue du Sentier, puis à circulation modérée pour garder l’accès au Serei et à la Place des Forains. Cerise sur le gâteau: une amélioration de la cadences du bus desservant cette place, actuellement toutes les 20 minutes de jour, rien en soirée, un rythme nettement insuffisant.

Le Service technique chauxois a par la suite rapidement lancé l’appel d’offre pour un parking de trois étages à l’endroit convenu. Le dépôt des offres était fixé au 8 mars. Un bureau chauxois a décroché le mandat, Evard Architectes SA. Occupant une dizaine d’employé·es, ce bureau a dernièrement planifié et réalisé les nouvelles marquises de la gare CFF.

Béton recyclé

La construction sera en béton recyclé pour les dalles et en bois suisse, local dans la mesure du possible, indique l’architecte Boris Evard. Des lames verticales de bois pré-grisaillées donneront un aspect uniforme au bâtiment: «La teinte est stable», assure Evard. Cette conception de façades permet d’éviter une fermeture complète du volume. On peut dès lors se passer d’une ventilation gourmande en énergie.

Le toit devrait être couvert de panneaux photovoltaïques, la discussion est encore en cours sur le choix du type d’installation.

Aberration écologique

Reste que des écologistes s’énervent: «C’est un mauvais signal au mauvais endroit», estime une militante pro-climat qui souhaite rester anonyme vu les tensions que génèrent toute prise de position publique sur la question automobile depuis la votation sur la H18. En effet, argumente-t-elle, «cette construction utilise un espace vide qui permet d’envisager toutes sortes d’activités ludiques, artistiques voire commerciales». Les spectacles de grande ampleur de la Plage des Six Pompes ne pourront plus s’y dérouler. Tout comme les feux d’artifices qui sont parfois tirés depuis le bâtiment Viteos adjacent. Sans parler des forains et de leurs attractions qui attirent la neige comme tout le monde sait. Surtout pas de vision à long terme. Et la durabilité n’est, une fois de plus, malheureusement pas au rendez-vous.

Mais voilà, le train est parti, les forains, consultés, n’ont pas tenu à rester sur cet emplacement trop excentré à leurs yeux. Quant au cirque Starlight, on le retrouvera au gré de ses tournées de l’autre côté de la ville, vers le musée paysan où une place herbeuse équipée est à disposition. Yanick Stauffer assure que la commune recherche des alternatives en collaboration avec La Plage des Six Pompes.

Les mises à l’enquête sont terminées tant pour la rue de la Ronde que la place des Forains, exit donc la possibilité d’oppositions. Il n’y a pas eu de discussion publique sur ces 455 places pour voitures. 50 places seront au régime parcomètre, le reste servira majoritairement de parking d’échange, une formule que la Ville entend favoriser.
Les travaux débuteront sans doute cette année.

Un imposant bloc (vue en arrivant depuis Bienne)

Qui a décidé?

Pourquoi le Conseil général n’a-t-il pas débattu d’une demande de crédit? L’objet «parking» est considéré comme faisant partie du patrimoine financier; autrement dit, c’est une affaire qui rapportera et l’exécutif local a donc la compétence de trancher. «La Commission INFRUEN, à savoir Commission des INFRastructures, de l’Urbanisme et de l’ENergie a été informée», précise Yanick Stauffer, délégué au marketing urbain, commercial, immobilier et foncier de la Ville. Il confirme qu’il n’y a pas de débat agendé à ce propos au Conseil Général.

Reste à trouver l’argent

Pour trouver l’argent, les autorités devront emprunter en fonction du rendement estimé de ces places de parc payantes. Les planificateurs modernes parlent de «conception à coût objectif» et partent de l’idée qu’il s’agit d’une manière «de dépenser mieux» en définissant d’abord ce que l’on espère gagner (entendez: ce que l’on peut effectivement dépenser) au lieu de déterminer le budget final du projet par de longues et chères études de projets. Bref, «atteindre les performances attendues sans dépasser les objectifs de coût fixés», comme explique savamment emarketing.fr.

Les tractations financières sont en cours. Pas possible d’en dire plus à ce stade.

Gagnant: la voiture.

Perdant: l’espace urbain flexible.