La Blaxploitation de long en large
Le Printemps culturel bat son plein. Le grand écran est de la partie. L’ABC et Passion Cinéma ont mijoté une affiche «allblack» avec des perles de Spike Lee et Melvin Van Peebles.
Voilà une occasion rêvée de réviser votre accent américain à La Chaux-de-Fonds, assis dans un siège confortable. Rappel: la blaxploitation est la solution utilisée par les moguls d’Hollywood pour drainer dans les salles la population noire étasunienne. Mélange de stéréotypes (des Noirs violents, sexy, drogués) et de critique sociale, ces films furent parmi les premiers à utiliser le funk et la soul dans leur bande-son.
Du lundi 8 mai au dimanche 14 mai, vous pourrez zyeuter comment des cinéastes de couleur ont tiré leur épingle du jeu en tournant des portraits féroces de Blancs exploiteurs sous couvert de cette récupération commerciale.
Discriminations et violences
Cinq films ouverts sur la réalité US marquée par les émeutes raciales, les meurtres commis par des policiers qui tirent dans le dos et les discriminations à la formation ou à l’embauche. On passera ainsi de notre culture cinématographique suisse assez feutrée à des films fiers de l’être comme ceux de Spike Lee, décrié à ses débuts à cause de ses prises de position claires contre la communauté WASP (White Anglo-Saxon Protestant).
Son film-culte «Do the Right Thing» figure en bonne place (date) dans la programmation de ce cycle.
Le programme Blaxploitation est complété par
– Shaft (1971) ou Les nuits rouges de Harlem réalisé par Gordon Parks; d’aucuns considèrent ce film comme le plus emblématique du genre (c’est Wikipedia qui l’écrit, on va les croire). La musique est signée Isaac Hayes, Grammy 1972 de la meilleure musique pour le cinéma. Attention, ami∙es du cinéma à la maison qui surfez, il y a une tripotée de films avec le même titre en anglais.
– Sweet sweetback’s badassss song (1971) de Melvin Van Peebles. 1h35 de castagne et de poursuites. Projeté à sa sortie dans les cinémas US classé X, il est recommandé 12 ans aujourd’hui. Marie Herny, programmatrice de l’ABC, estime que ce film «est la pierre angulaire de cette époque, hyper-significatif». C’est «un tournant radical dans la représentation des Noir∙es Américain∙es dans le cinéma» note pour sa part Passion Cinéma. Earth Wind and Fire a composé une partie de la bande son de ce film, l’autre étant du réalisateur himself.
– Moonlight (2016) de Barry Jenkins. Son film a récolté la bagatelle de trois Oscars, un Golden Globe et 185 autres distinctions et nominations. Citons pour la culture cinéphile, le Prix de l’orchidée d’or Halekulani du meilleur long-métrage de fiction au Festival international du film d’Hawaï et une nomination pour la Grenouille d’or de la meilleure photographie à James Laxton à Łódź en Pologne.
– Blindspotting (2018) Carlos Lopez Estrada. Marie Herny est très contente d’avoir ce film à l’affiche. Il était passé un peu inaperçu lors de sa sortie. Son propos est contemporain, les bavures policières sont mises en exergue. Le scénario a été coécrit par les deux acteurs Rafael CasaL et Daveed Diggs. Celui-ci est déjà venu à La Chaux-de-Fonds: Il joue avec le groupe hip hop de Los Angeles Clipping entendu à Bikini Test le 12 novembre 2022
Ce cycle afro-américain s’inscrit en prolongement de la Semaine d’action contre le racisme. Notons que cette manifestation a duré nettement plus qu’une semaine 😉. Madame Afra Kane, marraine de ce foisonnement d’évènements relève qu’en Suisse on a tendance à se penser immunisé contre le racisme et les discriminations, «alors que les enquêtes de l’Office fédéral de la statistique démontrent le contraire».
Causerie visuelle: Noir c’est noir
La formule n’est pas courante: une ciné-conférence attend les amatrices et amateurs le jeudi 11 mai à l’ABC. De nombreux extraits de films du cinéma pluriel des Amériques noires, ponctuent la causerie animée par Vincent Adatte de Passion Cinéma.
Les Amériques black ne forment pas une nation ou une région géographique. Marqueur de l’héritage esclavagiste, cette entité s’étend du Brésil aux confins du Canada en passant par les rivages caraïbes de Cuba aux Etats-Unis. Cette culture minoritaire a produit force pellicules à découvrir à cette occasion.
De bien beaux films à saisir, on a rarement l’occasion de voir d’aussi «vieilles» productions US.