La Tchauxtex, tissu, broderie et couture
Chafotex se réincarne en La Tchauxtex pour que l’aventure du textile et de la couture continue à La Chaux-de-Fonds.
On l’a su. On l’a lu. On l’a pleuré. Le magasin Chafotex a fermé. Depuis fin septembre 2024, le Pod n’est plus le même pour les aventurières et aventuriers de l’aiguille, de la machine et du crochet à La Tchaux. Le tissu, le fil, les accessoires et les machines s’achètent de plus en plus en ligne.
Tâter, tester et trouver le bon tissu
Mais quoi de mieux que de pouvoir essayer, toucher et voir avant de se mettre à créer? Quoi de mieux que de pouvoir parler de tissu, de broderie et couture avec d’autres personnes passionnées ? Pour sauver le dernier commerce familial de textile de la région, Hannah Osborne a repris une partie des textiles et matériels et trouvé un petit local pour lancer son projet d’établissement couturier.
Un crowdfunding est en préparation et un deal a déjà été trouvé avec la marque Elna pour permettre à la clientèle d’essayer ses machines à coudre avant de les acheter. Vous pouvez ainsi tester une surjeteuse par exemple.
Tchauxtex, LA bonne idée!
L’ouverture a eu lieu le premier décembre et un petit showroom est déjà là, sur la place des Six-Pompes, dans l’arrière-boutique du magasin mexicain El Mariachi (anciennement El Verano). Certaines se sont risquées à la plaisanterie « maintenant c’est une boutique «Tex-Mex» …)
Le nom Tchauxtex a été choisi par similarité sonore avec Chafotex, et surtout parce qu’on y vend du textile à la Tchaux. Le magasin se veut spécialiser dans le textile et reprendre les mêmes fournisseurs que Chafotex. Cliente de longue date chez Chafotex, Hannah Osborne connaît bien le métier.
Contacts et commerce
Elle se dit incapable de passer devant un magasin de textile sans y entrer, et imaginer tout ce que l’humanité peut faire avec des tissus. Pour parfaire ses connaissances, elle participe à des voyages de groupe de passionné-e-s de textiles. Dernièrement elle était en Norvège pour y suivre des designers avec qui elle échange depuis des années.
Le magasin Tchauxtex pourrait reprendre certains des fils et créations de ces designers pour les vendre au public chaux-de-fonnier. En outre, les marques de tissus et fils vendues seraient différentes de celles des autres commerces de couture en ville. L’idée serait aussi pour Hannah de permettre à sa clientèle de prendre un café sur place et discuter tranquillement dans son local.
Réhabiliter fil et tissu
Hannah Osborne a été volontaire à Laine d’Ici basé à Cernier, une filature qui existe toujours malgré le fait que la production de laine peine à exister en Suisse. Elle regrette que certains agriculteurs se voient contraints de brûler de la laine, ou la donner pour servir d’isolant.
Hannah souhaiterait redonner de la valeur, artisanale et sociale, à la laine et au fil tout en motivant un public transgénérationnel. «Il y a tellement de communautés diverses, de tous âges et de toutes origines, qui s’intéressent à cela sur les réseaux sociaux, ce n’est vraiment pas qu’un truc de retraitée».
Coudre et persévérer
«Si une partie du public qui s’était mis au tricot pendant la pandémie n’a pas persévéré, j’aimerais donner aux personnes qui souhaitent continuer un espace non jugeant pour vivre leur passion», explique Hannah Osborne.
Elle souhaite aussi insuffler sa passion aux personnes qui ont été dégoutées par leurs cours de couture à l’école. «Les temps ont changé» affirme-t-elle, «et les jeunes qui ont envie d’essayer une machine à coudre doivent pouvoir le faire sans se sentir mal ou être jugé·es».
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Portrait d’une battante
Arrivée en Suisse en 1992, puis à La Chaux-de-Fonds en 1994, la citoyenne binationale US-CH Hannah Osborne y est installée avec son fils cadet (18 ans et les joies administratives de la vie d’adulte devant les yeux) alors que les deux grands (26 et 23 ans) sont hors du cocon.
Après quelques pérégrinations en Suisse, un divorce et des recherches infructueuses d’emplois, Hannah revient dans les montagnes neuchâteloises l’an dernier, quelques jours avant la tempête du 24 juillet dernier.
Crèches dignes du Mordor
L’enthousiasme chevillé au corps, Hannah Osborne n’est pas de ces Américaines béates devant tout ce qui est suisse. Connectée avec la réalité, Hannah a vécu ici depuis assez longtemps pour critiquer son pays d’adoption.
En témoigne cette remarque sur sa page LinkedIn: «J’ai élevé une famille dans un pays où la garde d’enfants est à la limite du mythique, digne du Mordor…». Elle a d’ailleurs couché sur le papier les expériences vécues en Suisse dans un ouvrage collectif de 31 femmes Inspired Journeys: Women Rock Switzerland. Au chapitre 3, intitulé «Toujours debout», Hannah ayant toujours soif d’apprendre et de partager a su émouvoir les lectrices. Les commentaires élogieux sur le Net reflètent l’impact de son vécu et de celui des 30 coautrices.
Désir de fil et d’aiguilles
«À la maison, il y a toujours eu une machine à coudre dans le corridor. Seule en Angleterre pendant mes études, je ne trouvais pas de couvre-lit à ma convenance. J’ai donc cherché un tissu à mon goût et me suis cousu un dessus-de-lit que j’utilise encore», sourit-elle.
Revenons à l’avenue Léopold-Robert où le magasin de textile qui a inspiré Tchautex avait élu domicile.
Hannah raconte comment elle a approché Stéphanie Wycart, dont les parents puis elle-même ont tenu Chafotex pendant 36 ans: «On a discuté de reprise de l’enseigne, mais comme elle avait déjà liquidé presque tout le stock, cela n’avait pas de sens. Heureusement, elle a accepté de me vendre le solde de son matériel ainsi que sa caisse électronique contenant les coordonnées de tous ses clients. Elle m’a aussi conseillé en matière de fournisseurs.»
Rappelons que Stéphanie Wycart a choisi de tirer la prise avant de faire faillite: son bail arrivait à échéance.
Besoin avéré
À la recherche d’un nouveau défi à relever, dame Osborne a foncé. Retenant que cette ville a un riche passé de formation en couture artistique, Hannah enquête sur les besoins de sa future clientèle. Effectuant un sondage à l’école de couture et à l’école d’art appliqués bingo, elle tombe sur des profs motivés qui lui indiquent de quoi auraient besoin leurs élèves. «Ainsi j’ai compris qu’il faudra des tissus de qualité, du beau et vrai coton, des fournitures solides, donc des textiles et de la mercerie qui font envie».
Désireuse de soutenir la production européenne, elle privilégie la simplicité des articles classiques, laine, lin, coton.
Sensations de proximité
«Il faut tenir un textile entre ses doigts pour déterminer s’il vous plaît ou pas, ce n’est pas à l’écran qu’on peut choisir une texture, un soyeux», s’enflamme Hannah. Pour commencer, elle a en tête de présenter des échantillons de la maison Sajou, commerce installée à Paris offrant des produits de qualité, conçus avec passion et respect du savoir-faire artisanal de France.
Signalons qu’elle a suivi plusieurs ateliers de teinture végétale au Château de Prangins. «Sa collection d’indiennes vaut le détour», assure Hannah.
Pourvu qu’elle trouve assez de soutiens pour perpétuer cette brillante conception dans de bonnes conditions 🧵.