Bienvenue au concurrent Ô

Surprise dans les boîtes aux lettres avant le 1er mars: un nouvel gratuit tout frais sorti de presse.

Certains l’ont pris pour une publicité du TCS. D’autres se sont précipités pour découvrir qui travaillait pour ce nouveau média hebdomadaire. Paraissant tous les vendredis, il est distribué dans le district de La Chaux-de-Fonds. Ce journal présente sur 24 pages un mix assez équilibré entre informations de politique locale et internationale, portraits et interviews, avec un coin sport accompagné de flash culturels.

Une rédaction solide

Outre une brochette de chroniqueuses et chroniqueurs, la rédaction est composée d’un rédacteur en chef, Giovanni Sammali, journaliste apprécié des uns et décriés par d’autres, ce qui prouve sa valeur: le journaliste dépourvu d’ennemis est fort suspect à mes yeux. Le raide-chef est assisté d’un stagiaire, Julien Paroz et de François Hainard à la culturelle.

Ces trois messieurs seront flanqués d’une demi-douzaine de collaborateurs et collaboratrices. On y trouve des journalistes blanchis sous le harnais, tels François Nussbaum et Françoise Boulianne-Redard.
De nombreuses chroniques tenues par des plumes connues sont annoncées, dont celles de Vincent Kohler et de son frère Olivier.
On suivra avec intérêt notre comique japonisant revenu, pandémie oblige, à ses premières amours (l’enseignement). La bataille sera rude chaque vendredi entre Bugnon qui se lâche d’un côté et Georges Baumgartner, sans nul doute en direct de Tokyo.

Pub coup de poing

A noter que la campagne de teasing du Ô a été particulièrement percutante: les affiches format mondial jaunes et bleues étaient déclinées en deux slogans: ils ont écrit l’histoire et Ils écrivent l’histoire où figuraient des personnalités chauxoises bien connues. Certaines affiches jaunes qui mentionnaient Laurent Kurth ont été barbouillées, comme quoi le ministre ne fait pas toujours l’unanimité dans les Montagnes. Bref, un joli coup de pub.

Rentable à l’horizon 2025

Pour l’instant, la publicité est encore discrète: 10 pages payantes sur 24, c’est le minimum pour que ce type de publication offerte sans contrepartie puisse tourner financièrement. A ce propos, pas un mot sur la forme juridique du journal dans ses colonnes.
Selon l’ATS, c’est une SA au capital de 100’000 francs, assortis de «financements privés». Ces autres bailleurs de fonds, qui souhaitent demeurer anonymes «sont sans rapport avec le monde des médias», selon Anthony Picard, que nous avons joint au téléphone. Il a déclaré avoir «établi un plan sur trois ans pour que le Ô soit rentable».

Sachez que Picard est président du BAN (Bureau d’Adresses de Neuchâtel SA, qui distribue des imprimés), qu’il préside le Conseil d’administration de l’Hôpital du Jura bernois et dirige les Médicentres de Tavannes, Moutier et Corgémont. Il s’agit de centres de santé régionaux disposant de radiologie qui regroupent des médecins de famille. En outre, il vient de vendre son imprimerie sise à St-Imier, Juillerat et Chervet à un groupe suisse alémanique. Voilà un l’homme ayant de l’énergie à revendre et du réseau.

Imprimé en Valais

Selon l’impressum, le tirage est fixé actuellement à 21’000 exemplaires. Ô est imprimé en Valais au Centre d’Impression Romand (CIR) SA à Monthey qui appartient au groupe EHS médias (un satellite de la galaxie Hersant, le Figaro, etc.). Cette imprimerie est dotée d’un duo de rotatives. Elle dispose ainsi de belles capacités techniques: les deux rotatives du CIR arrivent chacune à imprimer 48 pages quadri à près de 90.000 exemplaires à l’heure. Il faut donc peu de temps pour rouler ce modeste hebdo.

Attention à ne pas confondre le CIR Monthey avec son prédécesseur CIR Centre d’impression des Ronquoz à Sion (où était roulé Le Nouvelliste) ou le Centre Rhodanien d’Impression SA (CRI) à Martigny, ce dernier faisant partie du groupe Gessler.

Une maquette indigeste

Si le premier numéro d’Ô a pu passer inaperçu ou directement dans la poubelle, c’est sans doute dû à son graphisme désuet, voire franchement vieillot. Par contre, le logo est plus réussi et dans l’air du temps. Voyez plutôt: une agence immobilière met en vente dans le quartier de la Charrière des appartement à l’enseigne Les Ô du Haut).

Classique mise en page sur quatre colonnes, avec de gros titres en caractère bâton tout aussi classiques. Ô ne fait donc guère de vagues question graphisme et police de caractère. Alors que son éditeur Anthony Picard connaît sur le bout des doigts ses gammes typographiques.

Éditeur qui par ailleurs n’hésite pas à prendre la plume pour se présenter et annoncer son gros coup: son journal sera le partenaire de la prochaine Braderie. Pierre-André Stoudmann, président de la fête s’en réjouit. «Notre comité est ravi», s’exclame-t-il en dernière page du Ô.

Un site web moderne

Autant le graphisme du journal papier est peu avenant, autant le site web en jette. La navigation est facile, le graphisme aéré, agrémenté de nombreuses photos. La navigation est conviviale. Question contenus, le Ô promet des infos tous les jours, on a pu le voir le Premier Mars où il a suivi le départ de la marche triomphante des amateurs d’apéro à Malvilliers. Et mis en ligne le message bien fade du Conseil d’État pour cette commémoration.

Ô, 1000metres.ch, le Tourbillon

Un gratuit ambitieux, notre site localier, un mensuel officiel: trois médias en six mois ont vu le jour à La Chaux-de-Fonds. Cet engouement est surprenant à l’heure où des augures prétendent que seuls les réseaux sociaux seront source d’informations d’ici peu. De quoi nous inquiéter à 1000METRES.ch. Nous n’avons guère d’armes financières pour organiser de contrefeu publicitaire. Espérons que les idées feront la différence à terme.
Comme le credo du Ô – informer «avec un angle optimiste et bienveillant tout en se permettant des critiques claires» si pertinentes – est sensiblement le même que le nôtre, nous devons cependant bouger.
L’émulation est porteuse d’idées. Pour offrir une tribune à nos internautes, nous mettons désormais en ligne la rubrique OUVREZ-LÀ. La recette est simple: inscrivez-vous, rédigez sur le formulaire proposé ajoutez deux photos et envoyez. Nous vous publierons en ligne après relecture.

On verra bien qui attire les clics les plus nombreux.

Remarquons enfin que Gio Sammali n’aura pas eu le temps de passer par la case chômage: à peine quitté son fauteuil de responsable de la comm de la commune, il a trouvé un job. Et hasard du calendrier et des délais d’impression, il signait le 25 février dans deux journaux gratuits en qualité de responsable. Du jamais lu.

Déclaration d’intérêts: le rédacteur a rencontré l’an dernier l’éditeur avant la parution du titre en vue d’une éventuelle collaboration.

Extrait de Vigousse n°525