Berezina au service social

Le service social de La Chaux-de-Fonds traverse une grave crise (taux d’aide sociale de 10,5% pour la Ville en 2021). En outre, 30% des dossiers rejetés par l’AI échouent à l’aide sociale. On décharge une caisse fédérale sur une caisse communale. Analyse et commentaires.

Comité d’accueil sans champagne

Lorsque vous entrez au service social à La Chaux-de-Fonds, des Securitas vous attendent à l’entrée. C’est une belle idée de gestion des conflits. Clairement, les contrôles sont permanents et au-delà la suspicion de fraude généralisée de la part des bénéficiaires, cela procède d’un ostracisme rampant: ces «feignasses aux soss» seraient en plus violents.

Constat alarmant

Depuis des années, le personnel tourne beaucoup et le phénomène s’accroît. Ainsi l’éthique du travail social est compromise. De plus, le travail administratif est conséquent tant pour les bénéficiaires que pour les employé∙es. De ce fait, un bon nombre de bénéficiaires se retrouvent sans assistant∙e social∙e pendant une période intermédiaire.
Il arrive ainsi dans certains cas, que le ou la bénéficiaire voie son dossier géré par dix référent∙es différent∙es en un an.
Quand un bénéficiaire n’a plus temporairement de référent, l’urgence, c’est de virer le budget mensuel attribué sur le compte du bénéficiaire afin que celle-ci ou celui-ci ne finisse par mendier faute d’avoir de quoi manger.

Déshabillage financier

Notons un fait: cela maintient les gens dans la précarité de faire de l’assistanat. Depuis des années, le budget reconnu a diminué et les contrôles ont augmentés: cela pousse les bénéficiaires à tricher parfois. Le coût de la vie en général a augmenté aussi et ainsi le budget personnel calculé puis versé par l’aide sociale n’est pas suffisant pour vivre dignement.

De la sorte, le versement des budgets personnels est devenu l’urgence absolue et l’insertion passe à la trappe. De surcroît, les contrôles, allant du déshabillage financier lors de l’inscription à la fiche mensuelle à remplir impérativement en passant les inspections inopinées, culpabilisent les bénéficiaires. Par ailleurs, l’ampleur de ces contrôles poussent parfois certains nouveaux travailleurs sociaux à démissionner durant leur temps d’essai.

Précarité

Au-delà de cet aspect, retenons que les working poors n’ont rien à faire au service social. La commune devrait obliger les entreprises à payer des salaires décents. La subvention actuelle que représente l’aide sociale, est en fait une subvention déguisée aux sociétés privées. Dans un pays libéral qui veut à tout prix traquer la fraude aux aides sociales, c’est un peu paradoxal qu’un employeur ayant un préjugé envers les prestations sociales emploie un travailleur sous-payé.

Comment s’en sortir?

Réinsérer permet pourtant de réduire les coûts. Les bénéficiaires s’entendent dire qu’ils coûtent cher, alors que rien n’est mis en place pour diminuer les frais et maintenir la dignité.

Alors que dans le canton de Vaud, l’aide sociale forme en apprentissage les 15-40 ans avec une bourse à la clé. Ces personnes sortent de l’aide pendant le temps de formation (2 à 4 ans). La baisse des bénéficiaires de l’aide sociale vaudoise est de 30 %.

D’autre part, l’aide sociale devrait refuser d’accepter les cas AI qui n’ont pas obtenu de rente. Le risque de continuer comme ça est que la commune fasse faillite et soit mise sous tutelle.

Autrement dit, on donne du poisson aux gens mais on ne leur apprend pas à pêcher. Quand elle a du poisson, la personne mange un jour mais si tu lui apprends à pêcher, elle mange toute sa vie.

L’AI devrait recommencer à distribuer plus généreusement des rentes, au lieu de pousser à la précarité (entre 60 et 75% de demandes sont refusés selon Temps présent du 14.10.21). On décharge ainsi une caisse fédérale sur une caisse communale