Le Café du Marché a deux âmes

Pour ses 140 ans, le Café du Marché a passé en mains féminines: rencontre avec Céline et Véronique, vaillantes nouvelles tenancières. La Gommeuse a rouvert dans la foulée.

Vu de la rue Neuve, il a l’air de rien ce petit troquet de quartier aux grandes fenêtres. Tiens, la marque de bière sur l’enseigne a changé, le logo aussi.

Un café simple et chaleureux

Un regard plus attentif sur la porte d’entrée indique que le Café du Marché existe depuis fort longtemps – cent quarante ans pour être précis – une antique plaque de la fédération des cafetiers en témoigne. Notez que cette issue donnant sur la rue a heureusement été rouverte.

Ce café n’a jamais fermé, sauf quelques épisodes de rénovation ou de pandémie.

Nombreuses tribulations

L’endroit a vu passer de nombreux tenanciers et tenancières. 1000METRES.CH a rencontré Jean-Claude, le plus fidèle client devant un ballon de rosé: «À 3,50.- seulement», souligne le bonhomme. Ouvrier ébéniste, il a bossé chez Jaquet à la rue du Collège. Ce Chauxois pur jus fait figure de mémoire du lieu:

«J’ai connu le Gino Corsini, et puis le Pierrot Surdez. Bon, y’ sont morts. À l’époque du Pierrot, on se castagnait parfois dans la partie qui donne sur le marché devant le bar. Il y a eu ensuite son fils, Christian, vite disparu lui aussi.»

On y trouve aussi de l’absinthe

Retraité depuis belle lurette, Jean-Claude habite juste à côté sur la place: «Comme ça y’a pas trop loin à marcher, pour moi c’est difficile d’aller à pied maintenant». Revenant sur le passage aux commande du jeune Jonas Martin, Jean-Claude note: «Les drogués qui foutaient la merde, le Jonas il te les as virés en leur disant je vous sers plus».

Tôt le matin, Jean-Claude va chercher au kiosque deux exemplaires du quotidien neuchâtelois et revient écluser son premier rosé. «C’est que moi j’ai déjà bu deux ristrets à la maison, à 4h du mat. Du vrai noir, pas de la pistrouille!». Une dernière anecdote? «Alain était un vrai maniaque de l’ordre, il alignait au millimètre les étiquettes des bouteilles derrière le bar».

La Gommeuse redécorée

Véronique et Céline, duo inouï

Après un passage éclair aux manettes, Alain Schaefer, ex-patron du Cosmo, a en effet remis ce printemps pour des raisons de santé. Il a trouvé en Véronique Jaunin une perle rare: sommelière de profession et motivée; armée de son CFC, elle hésitait un brin à reprendre l’affaire seule. En novembre 2023 Alain lui présente Céline Jeanneret qui tenait la Maison DuBois au Locle.

Côté rue Neuve

Coup de pot, les deux femmes qui ne se connaissaient pas avant de bosser ensemble, ont des atomes crochus, le courant passe. «On a un feeling commun, quasi le même fonctionnement, ça roule», sourit Céline. «Il faut dire qu’Alain nous a laissé un outil en or, avec des comptes en ordre, c’est un plus pour démarrer».

Sourire, sourire et encore sourire

C’est la philosophie accueillante pratiquée par Véronique, qui sort de seize ans dans l’horlogerie chez Tag Heuer; elle avait la nostalgie du contact avec la clientèle. Elle virevolte d’une table à l’autre comme un poisson dans l’eau. À l’écoute de la clientèle, Véronique cuisine aussi, «afin de ne pas dépendre d’un cuistot, difficile à trouver de nos jours».

En attendant le caquelon

Pour sa part, Céline née au Locle, se réjouit de relever un défi différent: «J’avais envie d’autre chose». Très dynamique comme sa complice, elle sait se ressourcer: pour se changer les idées, Céline va se balader avec son fidèle chien, nommé Cerise.

Elles fourmillent de projets, du genre créer un coin enfants avec des jeux adaptés. Elles participent en outre aux jeudredis bleus, nouvelle formule d’animation des commerçants du périmètre Marché-Carmagnole.

Concentration

Coup de peinture

D’emblée, elles décident de donner un coup de peinture. Et d’ajouter quelques touches perso à la déco. Pas de révolution donc, une variation sur un fond solide, le bar comme on n’en fait rarement aujourd’hui est désormais ornée de petites fleurs fraîches, le tout a un air pimpant de bon aloi.

Exit la vieille caisse enregistreuse et les copies de plaques émaillées, la ferblanterie de la ventilation a disparu sous une couche foncée, ça à de la gueule.

Présentation sympa

Et de curieux ronds sont apparus aux murs entre les tables: de quoi placer sa doudoune à proximité sans risquer de se la faire chouraver.

Table ronde appréciée

Toujours au rendez-vous, les chaises en bois, les tables vintage et les bancs d’angle en bois itou. Dans la salle, une vaste table ronde attend les équipes de copains et copines, la haute table de bar ayant migré dehors.

Assez de place pour les pieds sous le plateau

Mythique, la porte de l’ex-cabine téléphonique rappelle le temps où il fallait de la monnaie pour lancer un coup de fil.

Foule en terrasse au soleil

Toute l’année qu’il pleuve, neige ou vente, les fumeurs tigent devant la porte. Lorsque le soleil luit, c’est une terrasse agréable, surtout en seconde partie de journée. Certes, il faudra attendre cet automne et les fin de travaux sur la Place du Marché pour en jouir pleinement, ce n’est que partie remise.

Dés, cartes et échiquiers

S’il y fait bon boire un coup voire plusieurs, ce café est aussi prisés des joueurs et joueuses. Le jeudi soir est dédié à la belote, les tapeurs de carton ont suffisamment de tapis pour assouvir leur passion. On jasse aussi, et les dés roulent avec régularité, dans une ambiance décontract, rien à voir avec un casino guindé.

Un bon jass au non-filtré

C’est un bistrot d’habitué·es où le tutoiement est vite proposé.

Gommeuse, le retour

Par ici la fondue

Pour les fondu·es de fromage, la Gommeuse, après un épisode de fermeture, revit: les caquelons attendent les convives. Les fourchettes tournent du lundi au samedi, sauf le mardi.
Céline y concocte aussi de délicieux grands gâteaux au fromage maison, idéal à partager pour l’apéro le samedi dès 11 heures. Ou en repas avec un petite salade verte de bon aloi.

À propos mangeaille, ne ratez pas la planchette, un must pour combler un petit creux et accompagner un coup de rouge.

Miam miam!

Ah, on allait oublier les cornets à la crème bricelet maison à 5.- ,  madeleine de Proust revisitée façon Chalet Heimelig.

On craque vite …

À signaler enfin (le rédacteur aime l’Irlande), de la vraie Guinness à la pression, c’est nourrissant et revigorant!

Joli choix pour grandes soifs

Pour les becs à bonbon, les bricelets au chocolat (du Cailler s’il vous plaît) sont une tuerie et pour les affamé·es il y a en sus des ficelles au beurre.

Aimant local

Le samedi, il faut jouer des coudes pour trouver une place, forains et clients du marché prennent chaises et bancs d’assaut.

 

Croisé en salle, un couple de Lausannois qui ne connaissaient pas du tout notre ville, sirotaient du non-filtré; ils ne tarissaient pas d’éloges: «C’est un vrai troquet comme on n’en fait plus, dans son jus ou presque, on a envie de s’y incruster», notait Madame.

Bientôt, vue sans voitures

«Faudrait voir à ce que cela ne devienne pas un bar pour bobos végan» note Julot, qui fréquente assidûment l‘endroit. Ses compagnons de tablée acquiescent, il faut maintenir le café tel quel. Sans nostalgie, mais avec ferveur, se garder un coin typique de La Chaux-de-Fonds sans en faire un musée.

Pas de danger, les deux tenancières ont un objectifs: la continuité.

Deux âmes, quatre anges

Pourquoi deux âmes au Café du Marché? L’une veille sur la salle côté rue Neuve, l’autre sur le bar, côté Place du Marché.
Et avec ses quatre anges gardiennes, Céline, Véronique, Jojo et Irina, le fort est bien tenu.

Café du Marché
Rue Neuve 10
La Chaux-de-Fonds

032 558 77 78

HORAIRES

Du lundi au vendredi   6h30 à 21h00
samedi                           6h30 à 14h30
Fermé dimanche

La Gommeuse

Fondues du lundi au samedi, fermé mardi + dimanche