Cérémonie laïque, comment l’organiser?

Naissance, mariage, décès ou divorce, la famille peut faire appel à des professionnels pour construire ensemble un rituel laïc. Rencontre avec un officiant.

Pour beaucoup d’entre nous, il règne un air de mystère autour des cérémonies organisées en dehors du cadre religieux, entendez sans la présence d’une autorité religieuse consacrée tel curé, pasteur, rabbin ou imam. Pour mieux comprendre l’esprit dans lequel les officiant·es laïques fournissent ce service social indispensable à la cohésion de la société, 1000METRES.CH a discuté avec un coordinateur de cérémonies de la manière dont fonctionnent ces rituels.

Apprivoiser l’absence

Donner un sens à l’affliction

Depuis deux ans, Eric Germann travaille dans le cadre d’un collectif intitulé «Le Pas». Souhaitant honorer et donner du sens aux étapes difficiles de la vie, il œuvre en collaboration avec deux collègues pour organiser des cérémonies mortuaires laïques. Ce collectif est souvent mandaté par des services de pompes funèbres en lien avec des familles affligées souhaitant une autre forme de cérémonie. Adepte de balades, de vélo et de yoga, Eric Germann officie de manière indépendante dans les montagnes neuchâteloises. D’un naturel réservé, il maîtrise adroitement la manière – d’aucuns diront les codes – adéquate pour diriger une cérémonie. Il pratique cette activité environ un tiers de son temps et deux tiers comme travailleur social.

Chemin vers l’inconnu

Signalons qu’il célèbre aussi des cérémonies de séparation ou divorce, afin d’éviter dit-il de «peindre en noir» la relation qui vient de se terminer.

Question de disponibilité

Les familles font appel à ce type de services par l’intermédiaire d’entreprises de pompes funèbres ou en contactant directement l’officiant par téléphone. Elles demandent une cérémonie à un·e des trois célébrant·es du collectif «Le Pas» ou à d’autres personnes. Leur choix se porte sur l’un·e ou l’autre officiant·e soit pour avoir déjà assisté à une cérémonie de deuil et en être sorti touché·es, soit par affinité ou connaissance. Mais surtout en fonction de la disponibilité du célébrant.

Solitude

En effet, polyvalent·es, les membres du Pas se complètent et se remplacent en fonction de leur agenda respectif. Car il arrive que la personne pressentie soit déjà occupée à préparer une cérémonie et ne peut dès lors assurer de service funèbre le jour voulu.

Cérémonies sur mesure

Eric Germann, comme ses collègues, réagit sans tarder dès lors qu’il a accepté de coordonner une cérémonie de funérailles. Il explique: «Sachez qu’il faut compter en général trois jours pour mettre sur pied cette démarche. Il s’agit de rencontrer la famille, définir ensemble le contenu de la cérémonie et collecter des informations sur le défunt. Puis de rédiger le texte d’adieu avant de le restituer lors de la cérémonie».

Tristesse © Patrick CHOLLET

La famille et l’officiant choisissent ensemble la musique enregistrée la plupart du temps. Parfois certaines familles désirent inviter un chœur ou un·e interprète pour chanter ou jouer un air apprécié si tel est le vœu de la personne disparue.

Baliser le parcours de vie

Pour savoir capter l’attention d’une audience affligée, il faut trouver les bons mots et, tâche essentielle, conter au plus juste les péripétie de la vie de l’être cher qui s’en est allé·e.

Dernières traces

Effectuant une recherche quasiment journalistique sur la personne décédée, Eric Germann se renseigne sur son histoire afin de sentir qui était la personne et vérifier les informations. Il s’agit en effet d’éviter les erreurs afin de pouvoir parler sans choquer par des imprécisions lors de la célébration. Eric German fixe rendez-vous au domicile du défunt ou chez un membre de sa famille. Il est important de créer du lien et une sorte d’intimité avec les membres de la famille, afin de gagner leur confiance. Ainsi, on pourra rendre un hommage émotionnel de leur proche désormais disparu.

Déterminer un lieu

Les cérémonies peuvent avoir lieu dans un centre funéraire, sans que cela soit inscrit dans le marbre. Il est tout aussi envisageable d’organiser un service funéraire au bord d’un lac ou dans une forêt par exemple.

On trouve les adresses des officiant·es ici. Dans le canton de Neuchâtel, il y a une dizaine de célébrants. L’association romande Acor (Association de Célébrants et d’Officiants Romands) regroupe l’ensemble des intervenantes laïques. Plusieurs genres de cérémonies sont proposées, dont certaines inattendues comme la reconversion professionnelle.

Motivation et formation

C’est parce qu’il a été intrigué par la mort et la façon dont elle est accueillie dans nos vies, qu’il a commencé à pratiquer ce métier. Pour Eric Germann, il est important de «prendre acte du départ de l’être cher, de mettre en avant ses passions, ses amours et ses relations. Et de s’associer à la douleur de son départ».

Crépuscule

Une formation est possible et se déroule à Genève. Pour sa part, il a été formé «sur le tas» par Mme Marianne Guignard, célébrante des Planchettes.

Charte et gros sous

Toutes les activités de ces officiant·es sont régies par une charte. Quant à la question délicate du tarif, elle est traitée différemment d’un·e célébrant·e à l’autre, des frais de déplacement notamment peuvent entrer en ligne de compte. Pour se faire une idée, l’Acor fournit quelques tarifs conseillés. Certaines travaillent à l’heure, d’autres appliquent des forfaits échelonnés. Au final, le montant d’une cérémonie funéraire varie entre CHF 900.- et CHF 1300.-.

La famille décide de vivre la cérémonie d’adieu dans l’intimité ou de l’ouvrir à tout le monde. Les demandes sont faites sur mesure, par exemple une famille a voulu que les gens viennent vêtus d’habits colorés et au final seule la moitié de l’assistance avait suivi les consignes et l’autre était en noir. Il se peut aussi que des musiques joyeuses soient diffusées.

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Eric Germann informe qu’en outre, un moment musical est organisé quatre fois par année par «Le Pas» pour maintenir le lien entre les vivants et les morts. Il a lieu à l’ancien crématoire, dans la salle décorée par Charles L’Eplattenier à l’entrée du cimetière de la Chaux-de-Fonds.
Le vénérable bâtiment peut accueillir une trentaine de personnes sur ses vieux bancs, le reste de l’assistance doit rester debout ou venir avec un coussin ou une couverture. En effet les mosaïques du sol, valeur patrimoniale protégée, ne supportent pas le contact de chaises supplémentaires.

Carte postale environ 1920 (DAV)

Note de la rédaction: il est aussi possible de réserver cet espace imposant de style sapin à un usage cérémoniel privé des familles endeuillées pour la somme de 210.- CHF + TVA (lire tout en bas de la page web).

Photos: © Chris Vuille (sauf autre mention)