Voyage en pays liquoreux

Il y a deux façons de boire de la liqueur, en cocktails ou pure. Visite aux promoteurs d’une boisson mexicaine peu connue, le xtabentún. Légende et miel s’entrecroisent.

À l’époque des sorties de boîte et de l’an neuf, pour épater les convives avec de l’inédit dans les verres à l’apéro ou après les cafés, 1000METRES.CH présente une boisson mexicaine qui est ni de la tequila ni de la bière Corona.
Ne vous attendez pas à des notes de dégustations savantes ou à des astuces de mixologie sensass. Affutez vos connaissances en suivant notre reporter dégustateur. On passe l’Atlantique, pour aborder au Yucatan.

Corne située au sud du Mexique qui remonte dans le Golfe du même nom, le Yucatan est la patrie d’origine de cette liqueur doublement sucrée. Le xtabentún est fait à partir de miel et de graines d’anis bio auquel on ajoute de l’alcool de canne à sucre genre rhum.
Pas trop alcoolisé(19,5°), le xtabentún se boit avec un glaçon à moins que vous ne préfériez concocter de remarquables mojitos avec ce produit.

Duo gagnant: miel et canne à sucre

Son étrange goût parfumé provient de la fleur de xtabentún. La fleur ressemble à des volubilis. Sa polyvalence lui vaut un place dans le bar des aficionados de cocktails. Servi en apéritif, digestif ou comme base de mix, le Yumbab plaira d’abord aux becs à sucre. Sa saveur de rhum est perceptible sans être entêtante.

Rien à voir avec du liseron (DR)

Caractérisée par sa subtile touche anisée, la version dont nous parlons est importée depuis peu en Europe par un couple de chaux-de-fonniers amoureux du Mexique. Ils l’ont découverte lors de leur premier périple en Amérique centrale alors qu’ils rejoignaient leur ami Ludovic.
Pour Debora, il s’agit d’un pays magique: «En repartant après un voyage éclair, sous avions l’impression d’avoir laissé un bout de nous-même là-bas»

Hasard fructueux

Dans une boutique de souvenirs pour touristes, le tenancier a fait goûter ce nectar miellé à Debora la tatouée et Jonathan le barbu. Qui sont repartis avec une bouteille de liqueur. Emballés par cette nouveauté, ils ont cherché à en savoir plus. Ludovic a contacté les deux patronnes créatrices de la marque Yumbab et les ont persuadées de leur accorder l’exclusivité de la diffusion en Europe entière. Ni une, ni deux, ils ont entrepris de promouvoir cette spécialité.

En position d’importation

L’an dernier en quelques mois, Ludovic et Jonathan ont monté la structure commerciale et importé une première palette.

Retour au Yucatan.

Animal-culte

Depuis des siècles, les Mexicains cultivent cette plante avec passion. «Il faut comprendre que l’histoire cette liqueur tourne autour des abeilles», explique Jonathan. «Celles qui font le miel de fleur de xtabentún ne piquent pas. Dans la culture maya, ces abeilles dites melipona ont un rôle cérémoniel central, on les retrouve en bijouterie, elles font encore l’objet d’une vénération». Un peu à la manière du scarabée égyptien.

Butinant les fleurs de xtabentún, leur miel est utilisé pour la fabrication de cette liqueur ancestrale qui a inspiré une jolie histoire.

Légende maya

La légende veut que deux sœurs jumelles, Xtabay et Utz Cole’l, vivaient en mauvais termes au même endroit. Elles étaient toutes deux très belles, mais la première traînait une réputation sulfureuse, ses mœurs libertines faisaient d’elle une pêcheresse honnie.
La seconde passait pour une fille pure, gentille et prévenante.

Il n’en était rien: hautaine, Utz Cole’l était envieuse et méprisait les pauvres. En revanche, sa sœur Xtabay soignait les malades et se tamponnait des rumeurs qui couraient à son propos.

Xtabay vint à mourir, mais on ne retrouva pas tout de suite son corps. Plusieurs jours après sa disparition, une odeur suave s’est répandu dans tout le village où elle habitait. Elle émanait de sa dépouille.

Sa sœur ordonna de l’enterrer, car à son avis, cela ne pouvait être son odeur. Peu après il poussa sur sa tombe une plante ayant une senteur identique, douce et plaisante.

En l’honneur de Xtabay, on décida de créer une liqueur portant le nom de xtabentún. Certains prétendent que si l’on boit ce breuvage mythique, on trouve plus facilement l’amour.

Lorsque Utz Cole’l mourut, une plante épineuse a poussé sur sa tombe, répandant une odeur épouvantable, écho olfactif de son méprisable caractère.

 

* * *

Nous avons rencontré la première fois Debora et Jonathan à leur rigolo stand à la Braderie, muni d’une balançoire. Enthousiaste, Debora ne cessait de remplir des verres de dégustation.
Lors de notre second entretien, ces deux acharnés de travail ont précisé d’emble qu’ils ne consommaient que peu d’alcool. Ils ne sont pas non plus experts en mixologie.
Tout deux ont la bosse du commerce, Jonathan étant en outre formé en électronique. Ils débordent de projets: créer une crème glacée, du chocolat, et pourquoi pas une recette de mojito.

Une base cocktail sympa

«Nous sommes en phase de développement, le site de vente en ligne existe, notre stock est à Romanel (VD), on démarre avec 200 bouteilles, pour ne pas nous essouffler».

Partant lentement pour courir longtemps, cette petite Sàrl vise à terme le marché européen. À noter qu’il existe quelques autres marques de xtabentún, de fabrication industrielle.

Principe go to bee

«Nous entendons soutenir l’apiculture sur place là-bas, un franc par bouteille vendue sera reversé aux producteurs. Nos savons que l’importation pollue du fait des transports, nous avons mis sur pied notre projet go to bee. Nous choisirons les bénéficiaires en fonction de la cohérence de leur démarche, de sa durabilité».

L’investissement a été consenti sur leurs économies, chacun·e des trois associés a encore une activité annexe histoire de payer les factures à la fin du mois.

Parions que leur liqueur fera fureur!

Santé